LES ARCS (Savoie), 12 décembre 2016 (AFP) – Dans « Patients », son premier galop d’essai au cinéma mené sans prétention, Grand Corps Malade raconte avec humilité et humour l’année de rééducation ayant suivi l’accident qui, à 20 ans, l’a rendu tétraplégique.

Le slameur français Fabien Marsaud, connu sous son nom d'artiste, Grand Corps Malade, le 21 octobre 2015 à Paris (AFP).

Coréalisé avec Medhi Idir, qui a réalisé l’ensemble de ses clips, ce long métrage autobiographique est adapté du livre éponyme du slameur de 39 ans paru en 2012, dans lequel il raconte son combat pour retrouver l’usage de ses bras et de ses jambes. « Tout les personnages du film ont existé et toutes les scènes ont eu lieu. Par pudeur, j’ai laissé de côté des éléments de mon histoire intime« , a expliqué à l’AFP Grand Corps Malade lors du festival des Arcs (Savoie), où le film était projeté en ouverture. « Patients » narre l’arrivée dans un centre de rééducation de Benjamin, un jeune étudiants en Staps (Sciences et techniques des activités physiques et sportives) paralysé après un mauvais plongeon dans une piscine.

Sans jamais chercher le coup d’éclat cinématographique, le film brille par la sincérité de son propos, bien servi par une galerie de personnages drôles et attachants que le néo-réalisateur a le mérite de ne jamais laisser en chemin. « J’aime tous les types d’écriture et j’avais envie de me frotter au cinéma. Au fur et à mesure de l’avancée du scénario, je me suis pris au jeu et j’ai eu envie d’aller au bout en le réalisant », a justifié Fabien Marsaud, de son vrai nom. « J’ai pris cette expérience presque froidement. Elle n’a pas été un exutoire. Je n’étais pas dans l’affect, mais dans l’application d’un scénario et dans la direction d’acteurs« , a-t-il insisté.

« Niquer des heures » pour passer le temps

Grand corps malade décrit avec une légèreté et une auto-dérision rafraîchissante un quotidien pourtant fait de combats perdus d’avance, de silences, d’intimité bafouée et de renoncements où il faut « niquer des heures » pour passer le temps. Le slameur n’évite aucune thématique douloureuse liée au handicap – pas même sa très tabou sexualité – et parvient, grâce à une touche humour toujours bien placée, à ne jamais flirter avec le larmoyant. « Dans les moments de galère, j’avais besoin de me marrer. C’est certainement l’année la plus difficile de ma vie, mais j’en garde de bons souvenirs parce qu’on a beaucoup déconné avec les potes du centre. L’humour du film existait vraiment« , a précisé celui qui se déplace aujourd’hui avec une canne. Le néo-réalisateur dit se sentir « légitime » à rire du handicap et explique qu’il « existe un humour handicapé« , plus « trash et cynique« , dont le film dévoile la partie la moins osée.

Si quelques longueurs et situations prévisibles du scénario pointent parfois, alourdissant le rythme du film et son récit chronologique, « Patients » offre au spectateur une plongée « pédagogique » dans l’univers du handicap. « La caméra suit l’évolution physique du personnage. Plus il évolue physiquement et plus des mouvements de caméra apparaissent. On ne voulait aucun effet« , détaille Medhi Idir. « Patients » est porté par une flopée de comédiens tous plus épatants les uns que les autres, jouant avec une grande justesse la partition millimétrée, très écrite, dictée par le slameur.

Le film a été tourné durant sept semaines au centre Coubert, en Seine-et-Marne, là-même où Grand Corps malade a effectué sa rééducation. Les acteurs ont travaillé au contact de son personnel soignant pour apprivoiser la gestuelle des patients en fauteuil, qui ont joué les figurants. « Le tournage a changé notre regard. On a compris que pour les personnes en situation de handicap, retrouver l’autonomie est beaucoup plus important que de pouvoir marcher à nouveau« , affirme Pablo Pauly, révélation du long métrage dans le rôle principal.

Côté bande son, le spectateur retrouve NTM, Naas ou encore Lunatic. Produit par Mandarin et Gaumont pour environ 4 millions d’euros, « Patients » sera à l’affiche des cinémas le 1er mars prochain.

Benoit Pavan

Légende photo : Le slameur français Fabien Marsaud, connu sous son nom d’artiste, Grand Corps Malade, le 21 octobre 2015 à Paris (AFP).

Publié le 12 décembre 2016 sur le fil de l’Agence France-Presse.

Lien web : http://www.france24.com/fr/20161212-grand-corps-malade-devoile-grand-ecran-patients

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